YAWENDA’ : une exposition extérieure célébrant 40 ans de théâtre autochtone au Québec

entrevue avec
Dave Jenniss
artiste et directeur artistique d’Ondinnok
Entrevue
publication
20 octobre 2025
mise à jour
21 octobre 2025
temps de lecture
4 minutes
Un texte de
Benoit Poirier

Ondinnok est un mot wendat désignant un « rituel théâtral de guérison, qui dévoile les secrets de l’âme ». Compagnie pionnière du théâtre autochtone d’ici, les Productions Ondinnok a été fondée en 1985 par Yves Sioui Durand (Nation wendat), Catherine Joncas (Québécoise) et John Blondin (Déline, Territoires du Nord-Ouest) afin de « reconstruire l’imaginaire autochtone et de bâtir un théâtre ancré dans les valeurs ancestrales des Premiers Peuples ».

Ayant intégré ses rangs en 2002, Dave Jenniss est un auteur, acteur, scénariste et metteur en scène de la nation Wolastoqiyik Wahsipekuk qui officie désormais comme son directeur artistique. Il est l’un des piliers de YAWENDA’ (qui signifie « voix, parole, langue, promesse » en wendat), une exposition extérieure célébrant 40 ans de théâtre autochtone au Québec, présentée jusqu’au 9 novembre dans le Quartier des spectacles.

Comment décririez-vous le rôle d’Ondinnok dans l’évolution du théâtre autochtone francophone ?

En 40 ans, Ondinnok a su se démarquer par son avant-gardisme : en 1985, il y avait beaucoup de gens qui ne comprenaient pas ce qu’ils voyaient, c’était ancestral, cérémonial, parfois chamanique, en plus de se dérouler dans des lieux in situ. La compagnie a toujours eu une vision plus grande, plus importante que ce qu’elle pouvait démontrer à ce moment-là; ça a pris de l’ampleur avec les années, les gens ont embrassé ce genre de théâtre, mais Ondinnok a toujours été vue comme étant dans la marge. Ce qui a été révolutionnaire, c’est que ça a donné une liberté sur scène aux autochtones — et ça, ça n’a pas changé.

Et depuis, d’autres compagnies ont vu le jour.

Oui : Onishka, d’Émilie Monnet, travaille beaucoup avec l’image et la vidéo; Menuentakuan, de Charles Bender, Marco Collin et Xavier Huard, fait de la création mais aussi de la traduction à partir de l’anglais; Productions AUEN, de Soleil Launière, c’est le corps, c’est physique, il y a du mouvement, de la poésie. On est quatre compagnies avec des missions différentes, mais chacune met son talent et sa vision au service du théâtre autochtone.

Quels moments clés de l’histoire du théâtre autochtone le public pourra-t-il découvrir en visitant l’exposition ?

Cette histoire-là est séparée en trois cycles, qui sont représentés à travers beaucoup d’images, de très grandes photos. De 1985 à 1995, c’était les débuts, des œuvres en lien avec la mythologie : comme je disais, c’était cérémonial et ancestral. De 1995 à début 2000, c’était le théâtre de guérison, avec lequel on cherchait à briser le cycle des problèmes sociaux dans les communautés. Et, de 2000 à aujourd’hui, c’est le théâtre plus contemporain, porté par une nouvelle génération d’acteurs, auteurs et metteurs en scène.

Vue de l’exposition « YAWENDA’ » sur la promenade des Artistes
Vue de l’exposition « YAWENDA’ » sur la promenade des Artistes
Exposition de costumes dans le cadre de « YAWENDA’ », présentée à Espace l’ONF
Vue de la vidéoprojection « Woli kpotenom – purification » sur la façade du pavillon Président-Kennedy

Parlez-nous des éléments satellites de l’exposition : la vidéoprojection de Woli kpotenom – purification…

Je sens beaucoup de lourdeur quand je viens à Montréal : Woli kpotenom – purification, c’est une vidéo qui montre une purification du Quartier, du territoire. On souhaite que les gens se laissent porter par ça : il y a beaucoup de pierres pour l’énergie, des représentations des quatre saisons, des étoiles, tout ce qui mène au calme.

… les costumes de la pièce maya Xajoj Tun Rabinal Achi et le documentaire sur Yves Sioui Durand.

Rabinal Achi, c’est une œuvre théâtrale guatémaltèque millénaire qui a été reconnue au patrimoine de l’UNESCO en 2008 : on l’a déjà interprétée, on avait les costumes traditionnels qui y sont associés, on s’est dit « peut-être que l’ONF aimerait exposer les costumes » — « ah ben oui pis en plus l’ONF a déjà fait un documentaire sur Yves », qu’on a décidé de monter aussi.

En tant que directeur artistique, qu’espérez-vous que le public ressente en découvrant YAWENDA’ ?

La grandeur des talents autochtones — qu’on comprenne un peu mieux qui on est comme artistes, qu’on comprenne le message, que ça donne le goût d’aller voir un spectacle. On veut montrer que 40 ans ça peut paraître long mais c’est aussi comme si c’était hier : à chaque année, Ondinnok doit recommencer son travail de transmission vers le public allochtone, donc l’exposition est l’une des plus belles publicités qu’on peut avoir.

Les quatre décennies de théâtre autochtone célébrées par YAWENDA’ sont marquées par des cycles. Ondinnok en a été l’initiateur ; depuis, ça prospère, et le futur s’annonce prometteur pour les artistes des Premières nations, pour leur prise de parole, pour leur expression artistique.

YAWENDA’

Du 11 septembre au 9 novembre 2025

Une exposition pour célébrer 40 ans de théâtre autochtone au Québec
Tous les jours et en soirée jusqu’à 23 h
Sur la promenade des Artistes

Woli kpotenom – purification
Projection tous les jours dès la tombée de la nuit 
Façade du pavillon Président-Kennedy de l’UQAM

Une coproduction d’Ondinnok et du Partenariat du Quartier des spectacles en collaboration avec l’Office national du film du Canada.

Exposition de costumes et projection du documentaire Salutations : Te’skennongweronne – Yves Sioui Durand
Espace ONF (1500, rue Balmoral)
Du lundi au vendredi, de 9 h à midi et de 13 h à 17 h (horaire sujet à changement)
Les costumes sont exposés en vitrine donc visibles en tout temps. 

GRATUIT

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