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Hip-hopéra, Carmen : liberté dans la ville

17 septembre 2021

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Carmen est libre, Carmen est sexy, Carmen est bohémienne. Et voici que Carmen évolue dans un environnement urbain et hip-hop qui lui va comme un gant. Le metteur en scène Louis Tremblay, de la compagnie La Tête de Pioche, propulse l’héroïne du célèbre opéra de Bizet dans un monde urbain pour un spectacle à grand déploiement en plein-air sur la place de la Paix.

Quand le Partenariat du Quartier des spectacles et ses partenaires, l’École nationale de théâtre du Canada, la Société des arts technologiques [SAT] et le Festival Mode + Design ont approché Louis Tremblay avec cette idée, ils ont vu une occasion rare de créer un spectacle de rue de grande envergure et de promouvoir davantage les arts de la rue dans l’espace public. Au Québec, malgré une abondance d’artistes de rue au talent reconnu, cette perspective est peu fréquente, par manque de moyens et par manque de reconnaissance pour les disciplines hors les murs. Hip-hopéra, Carmen s’amène donc sur la place de la Paix avec sa grosse scène à plusieurs paliers et un décor imposant, mais surtout une équipe multiprimée, où se côtoient des chanteurs classiques (Michèle Motard, Rose Naggar-Tremblay et Pierre Heault), un rappeur québécois culte (Sans Pression) et des artistes issus du monde de la musique pop (le réalisateur Loïc Thériault) ou de l’humour (le conseiller dramaturgique Danis Durocher). Sans oublier des stylistes venus tout droit du monde de la mode pour confectionner des costumes spectaculaires (Randy Smith, sous la direction de Chantal Durivage et assisté par Emmanuelle Néron).

« On raconte Carmen en 35 minutes top chrono, dévoile le metteur en scène. On a choisi de montrer une Carmen féministe, en rébellion contre l’ordre établi et en profonde quête de liberté. L’opéra raconte certes une histoire d’amour passionnelle, qu’on ne se privera pas d’explorer, mais Carmen est avant tout pour moi un symbole de liberté d’esprit et de liberté sexuelle : une femme farouchement indépendante. Ce sera un spectacle entièrement musical, naviguant entre la puissance orchestrale des partitions originales et des superpositions de boucles hip-hop. Un travail de juxtaposition passionnant. »

Une suite logique pour La Tête de Pioche

Si la Tête de Pioche est une compagnie de théâtre immersif en plein-air, notamment experte en théâtre de marionnettes et théâtres d’objets, également créatrice de formes inédites qui brisent le rapport traditionnel scène-salle, son metteur en scène attitré est avant tout un passionné de musique. Dans l’histoire la compagnie, il y a donc eu un spectacle musical de théâtre d’objets sur la carrière de la cantatrice québécoise Edith Tremblay (Êtes-vous nés un jour de pluie ?, 2004) et une pièce baignée de la musique de Boris Vian (Nous irons danser sur vos tombes, 2010). À titre personnel, Louis Tremblay allie aussi sa fibre musicale et son talent de metteur en scène au sein d’autres projets, notamment des collaborations avec Misteur Valaire ou avec Emile Bilodeau.

« J’aime bien dire que je fais du vidéoclip live. Les spectacles ressemblent vraiment à des vidéoclips dans ma tête quand je les conçois, même s’il n’y a jamais de vidéo en tant que tel dans le résultat final. Je travaille presque toujours avec des trames musicales continues, sur lesquelles se greffent des mondes imagés et du mouvement. Les codes de narration du vidéoclip me pourchassent. »

Le rap est fait pour Carmen

« Le rap et l’opéra ont plus de points communs qu’il n’y paraît, opine l’artiste. Tous deux peuvent paraître hermétiques à une certaine frange de spectateurs; tous deux s’ancrent dans une codification bien précise et un ensemble de conventions dans lesquels les néophytes peuvent se perdre, et en même temps tous deux sont universels et populaires au point que tout le monde connaît les airs sans le savoir et tout le monde est pétri d’un certain savoir à leur sujet. »

Des codes intéressants à mettre ensemble, à juxtaposer et à déconstruire pour créer des chocs. Louis Tremblay nous l’assure : la contemporanéité du hip-hop s’allie à merveille aux codes classiques et à l’ampleur orchestrale de l’opéra. « J’ai choisi Sans Pression, un vétéran de l’âge d’or du rap québécois des années 90, parce qu’il incarne encore à mes yeux une sorte de quintessence du hip-hop, dont il embrasse les conventions avec grâce. Il a une prestance hip hop remarquable. Ça se passe dans sa posture, dans sa présence, dans sa gestuelle. Je l’ai aussi choisi évidemment pour son travail : il a écrit tous les passages rap du spectacle, sur une musique inspirée de la partition originale de l’opéra et remaniée avec brio par Loïc. »

Dans cet univers iconoclaste, Carmen est interprétée par deux chanteuses, dans un dédoublement qui accentue sa personnalité magnétique. À leurs côtés, Sans Pression devient une sorte de choryphée, « un commentateur qui se permet d’haranguer la foule et qui se plaît à guider l’auditeur ».

« Dans ce spectacle, on s’amuse aussi beaucoup avec les conventions vestimentaires : d’un côté le style urbain du hip-hop, de l’autre les robes majestueuses et théâtrales de l’opéra », conclut le metteur en scène. La compagnie de théâtre collabore d’ailleurs pour la première fois avec le festival Mode + Design : voilà qui est singulier !

Hip-Hopéra, Carmen

Du 16 au 19 septembre et du 23 au 26 septembre
Deux représentations par soir : 19 h et 20 h 30
Place de la Paix, Quartier des spectacles

Pas de réservation, places limitées. Passeport vaccinal exigé (avec preuve d’identité) selon les directives du Gouvernement du Québec.

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