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UN LIVRE SUR L’HISTOIRE DU QUARTIER DES SPECTACLES : 15 ANS DÉJÀ !

19 octobre 2018

Texte principal du billet

Par Philippe Couture

Il y a 15 ans, le projet de Quartier des spectacles prenait son envol. D’abord une grande idée sur papier, puis un réel succès sur le bitume et dans les salles de spectacle, l’ancien quartier négligé est devenu un espace urbain créatif et prospère.

Une riche histoire racontée dans le livre Tous pour un Quartier des spectacles Montréal, écrit par Claude Deschênes, et préfacé par le président du conseil d’administration du Partenariat du Quartier des spectacles, Jacques K. Primeau. Discussion avec deux amoureux du quartier.

IL Y A QUINZE ANS, PEU DE GENS AURAIENT IMAGINÉ L’AMPLEUR DU QUARTIER DES SPECTACLES ACTUEL. QUE FAUT-IL LE PLUS RETENIR DE CETTE TRANSFORMATION ?

Claude Deschênes : Quand je me suis installé dans le Quartier, même si la Place des Arts, le TNM ou le Métropolis faisaient déjà partie du paysage, le secteur était clairement dévitalisé. J’étais étonné de découvrir une si grande force créative, mais un cadre si peu invitant. Puis, avant même que le projet du Quartier des spectacles soit imaginé, le Musée d’art contemporain est apparu, puis la Cinérobothèque de l’ONF, et ça a été pour moi le début d’un temps nouveau. À partir de là, ça n’a jamais cessé de se transformer, et j’ai observé le projet du Quartier des spectacles prendre forme au début des années 2000. Je suis un grand optimiste de nature, mais il y avait là toutes les raisons de se réjouir. Ça me fascinait de voir la concertation de tous les intervenants impliqués, et de constater que les directeurs de si grosses institutions acceptaient de faire consensus pour se rallier à une organisation naissante qui les chapeauterait et les accompagnerait. Ce projet était plus grand qu’eux, et ils en ont vite pris la mesure.

COMMENT PEUT-ON EXPLIQUER CETTE RARE COHÉSION ?

Jacques K. Primeau : C’est la force du collectif. Le milieu culturel montréalais a prouvé que, pour réaliser des projets de cette envergure, s’unir est la meilleure stratégie. Je souhaite d’ailleurs que ce livre inspire d’autres mouvements collectifs, qu’il démontre l’avantage de se rassembler. Car l’union fait la force, et c’est vrai dans le culturel comme dans le sociocommunautaire ou dans le monde des affaires. J’ai demandé à Claude Deschênes d’écrire ce livre, car je voulais qu’on ait un portrait historique de ce projet, pour en tirer des conclusions pour le futur.

Claude Deschênes : Il y a eu une vraie synergie, un alignement des astres entre plusieurs gros joueurs tels que Spectra, la Place des Arts, Juste Pour Rire, Culture Montréal de même que le Complexe Desjardins. Je pense aussi que des gens comme Pierre Deschênes, qui a été directeur général du Partenariat du Quartier des spectacles au cours des premières années, ont utilisé les meilleures stratégies de consultation : tout le monde a été partie prenante et a eu son mot à dire, petit à petit, mais la chose s’est déroulée dans une grande efficacité.

LE QUARTIER EST AUSSI NÉ D’UNE GRANDE VOLONTÉ POLITIQUE. COMMENT ANALYSEZ-VOUS LE RÔLE DES POUVOIRS PUBLICS ?

Claude Deschênes : Il y avait une conjoncture favorable au début des années 2000, moment où les autorités ont été portées par l’idée que la culture pouvait être un levier économique puissant. Le projet du Quartier des spectacles est l’incarnation parfaite de cette idée, et les 15 dernières années nous ont montré qu’en effet, investir massivement dans la culture a de fortes retombées dans tous les secteurs et peut mener un quartier à se développer de manière foudroyante. Les retombées ont été plus importantes que prévu. Il faut aussi souligner l’ouverture du maire Gérald Tremblay, qui a été un allié dès la première heure du projet. L’administration municipale ramait dans le même sens que le gouvernement provincial de l’époque, lequel croyait beaucoup à cette idée de la culture comme moteur de développement économique.

LE LIVRE EST RYTHMÉ PAR DES PORTRAITS DES LIEUX CULTURELS LES PLUS EMBLÉMATIQUES DU QUARTIER, COMME UNE SÉRIE DE CARTES POSTALES. POURQUOI CE CHOIX ?

Claude Deschênes : Raconter l’histoire du Quartier des spectacles, c’est immense ! Il y avait une quantité astronomique d’informations à transmettre, et je disposais d’une matière énorme après avoir fait de nombreuses entrevues avec des intervenants variés. Je me suis dit qu’une approche strictement chronologique serait trop scolaire. Il fallait que ce livre soit davantage à l’image de la diversité et de la créativité du Quartier. J’ai imaginé naturellement ce parcours urbain, d’un lieu culturel à l’autre, à l’image des déambulations de l’amateur de culture dans le Quartier. J’y ai inséré aussi des paroles de chansons québécoises qui me semblaient faire écho aux sujets. Je me chante toujours des chansons dans ma tête – c’est un peu une plongée dans mon espace mental.

APRÈS 15 ANS, LE QUARTIER CONTINUE DE SE TRANSFORMER. QUE LUI SOUHAITEZ-VOUS POUR L’AVENIR ?

Jacques K. Primeau : On a prouvé qu’un Quartier des spectacles a favorisé le développement économique, immobilier et urbain. Maintenant, il faut que le Quartier accentue sa mission d’incubateur créatif et qu’il accueille encore davantage les artistes en pleine création. La Place des Arts, le TNM, la SAT, le Monument-National et l’École nationale de théâtre du Canada sont déjà des moteurs et lieux de création privilégiés depuis les débuts. Récemment, de nouveaux lieux de création ont élu domicile dans le Quartier : le centre de création des 7 doigts de la main, l’Édifice Wilder pour la danse bouillonne de créateurs avec des résidences pour les chorégraphes et l’école de danse contemporaine de Montréal ; il y aura bientôt l’arrivée de l’ONF et l’École des arts numériques, de l'animation et du design (NAD) ; il faut continuer à aller dans cette direction.

Le Quartier est celui de tous les créateurs et de tous les Montréalais et mon souhait est qu’il nourrisse et profite à l’ensemble des industries culturelles montréalaises. Je voudrais donc qu’il soit encore davantage l’écho de toute la création montréalaise, que son approche de l’utilisation de l’espace public et de la concertation, qui fait le succès du Quartier depuis ses débuts, inspire d’autres initiatives audacieuses et de belles collaborations.

Claude Deschênes : Je souhaite au Quartier d’oser être encore plus champ gauche et de prendre des risques créatifs, pour se distinguer de l’offre culturelle disponible ailleurs.


Crédits des photos en-tête :

Frédérique Ménard-Aubin / Place des Festivals (photo : Martine Doyon) / Les Jardins Gamelin (photo : Ulysse Lemerise-OSA) / SAT, « Pixiness » (photo : Martine Doyon) / « Vent d'esprit » de Herman Kolgen (photo : Martine Doyon) / « Sphères polaires » Luminothérapie (photo : Martine Doyon) / « Le Super Méga Continental » (photo : Sylvain Émard Danse) / Illumination 2-22 (photo : Martine Doyon)

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