Le quartier des déambulations

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Vivez la visite guidée gratuite du Quartier des spectacles à travers les yeux d’un participant, Xavier K. Richard. Une balade de 2 h 30 à pied qui risque fort de vous étonner par son parcours, dans le temps et dans le présent, du km² le plus culturel de Montréal.

Par Xavier K. Richard

C’était un dimanche matin. À peine un café derrière la cravate, un petit groupe de visiteurs est sur le point de partir à la découverte du Quartier des spectacles grâce à un jeune guide dégourdi, étudiant en urbanisme et finissant de l’Institut d’hôtellerie et de tourisme du Québec.

Dans notre petit groupe, il y a, entre autres, une grande Alsacienne et son copain d’Amérique latine, un couple de Québécois particulièrement savants sur l’histoire de Montréal, et une femme seule qui, d’entrée de jeu, avoue aimer « être une touriste dans sa propre ville », comme elle dit. En effet, cette visite guidée du Quartier des spectacles est l’activité rêvée pour découvrir et pour approfondir les histoires et légendes qui sont devenues au fil du temps les piliers du quartier.

Point de départ : la place des Festivals pour retracer l’histoire des premières fois.

L’introduction de la visite vaut à elle seule le détour en permettant aux explorateurs que nous sommes de remettre l’immense chantier urbanistique dans une perspective historique. Finie l’époque où le centre-ville était d’abord et avant tout un lieu pour travailler, et qui s’endormait le soir venu jusqu’au lendemain. Nous sommes passés à une ère de forte densification. Aujourd’hui, le territoire du Quartier des spectacles compte quelque 12 000 résidants, et près de 85 000 personnes habitent dans Ville-Marie, l’arrondissement du centre-ville de Montréal. En plus des résidents, 1,8 million de personnes ont fréquenté en 2014 les 30 salles de spectacles du Quartier, sans compter l’achalandage lors des festivals et celui de tous les bars spectacles et galeries qui l’animent.

Sur la place des Festivals, on retrace l’histoire des « premières fois » : des premiers grands rassemblements culturels gratuits dans le quartier dans les années 1980 jusqu’aux premières bases du Quartier des spectacles au début des années 2000, puis aux nouveaux projets en chantier tels que l’Édifice Wilder – Espace danse et l’îlot Balmoral, futur siège social de l’Office national du film du Canada, le long de la place des Festivals.

Des fois, ça prend un guide pour nous faire lever les yeux au ciel.

Notre guide, Marc-André, nous désigne une œuvre qu’aucun d’entre nous n’avait jamais aperçue. Nichée sur le Musée d’art contemporain de Montréal, La Voie lactée est une photographie de Geneviève Cadieux qui représente les lèvres de la mère de l’artiste. Toujours sur la place des Festivals, pendant qu’on admire la découverte, nous croisons, par chance, le maestro Kent Nagano qui traverse la place en compagnie de sa famille. Les membres de notre groupe sont ravis. Nous ne pouvons être plus au cœur de l’action du Quartier!

La piste nous mène de la promenade des Artistes à la Place des Arts, jadis premier grand chantier culturel de la Révolution tranquille en 1963. On apprend que l’entreprise soulève alors les passions, car le projet est accusé de ne servir que les bourgeois. En effet, l’art et la culture de l’époque sont considérés comme des produits de luxe. Le salaire minimum est quand même 0,63 $ de l’heure alors que l’opéra et les concerts coûtent de 8 à 15 $ la représentation. C’est un certain Claude Léveillée qui, en 1964, remplira les 3 000 sièges et qui démontrera que l’art peut aussi être populaire.

D’anecdotes en découvertes, la visite se poursuit.

Nous passons par la Maison symphonique, le Théâtre du Nouveau Monde, puis par le Monument-National pour un cours condensé d’histoire nationale et quelques instants d’émerveillement sur la scène de cette grande salle. Puis, arrêt à la place de la Paix à l’ombre du dôme de la Société des arts technologiques (SAT) et pause au 2-22 où logent, entre autres, La Vitrine et CIBL. En prenant le temps de s’attarder, de regarder, de se faire raconter, le groupe est témoin de phrases et d’anecdotes savoureuses aussi instructives que divertissantes, telles que « Montréal est la seule ville au monde où le soleil se couche au Nord », ou encore « Ça, c’est notre immeuble “Yes, we can!” ».

Derrière la terrasse des Foufounes électriques se trouvent les Habitations Jeanne-Mance. Au frais dans cette oasis de verdure, nous en apprenons sur les origines de ce projet de 1959 du maire Jean Drapeau. À l’époque, le maire souhaitait surtout faire disparaître les taudis en vue de l’exposition universelle et il a même milité pour y installer sa cité des ondes; celle-ci, comme on le sait, fut plutôt construite dans le Faubourg à la mélasse. Faits étonnants : les Habitations, c’est 2 000 habitants, 70 groupes culturels différents, 800 logements abordables et un boisé de 400 arbres.

En terminant la visite, de l’Université du Québec à Montréal à la Grande Bibliothèque et enfin aux Jardins Gamelin, c’est une petite allée qui retient l’attention des promeneurs. Nous passons ici toutes les semaines et découvrons pour la première fois l’Allée des bouquinistes, soit quatre librairies qui ouvrent leurs étalages les week-ends en été, le long de la Grande Bibliothèque.

Bonnes visites, bonnes déambulations, bonnes découvertes!