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10 anecdotes sur Gaby, le maître du portrait

15 septembre 2014

Texte principal du billet

Ronald Desmarais, le fils du photographe Gabriel «Gaby» Desmarais, peut raconter des tonnes d’histoires rocambolesques sur son père, l’un des plus grands portraitistes de l’histoire du Québec. Plus de 20 ans après la mort du photographe, Bibliothèque et Archives nationales du Québec et le Partenariat du Quartier des spectacles s’associent pour présenter l’exposition Gaby – Maître du portrait, qui présente, à l’extérieur (promenade des Artistes, Parterre et boul. de Maisonneuve) comme à l’intérieur (Grande Bibliothèque), près de 90 photographies de vedettes et d’artistes d’ici et d’ailleurs que Gaby a immortalisés des années 1940 jusqu’aux années 1980. De Dominique Michel à Félix Leclerc, en passant par Louis Armstrong, Jayne Mansfield et Jean Cocteau.

Voici 10 anecdotes sur la vie hors de l’ordinaire de Gaby, telles que racontées par Ronald Desmarais.


1. Le flair de Gaby
Les circonstances entourant le portrait que mon père a fait d’Albert Schweitzer, théologien, musicien, philosophe et docteur franco-allemand installé au Gabon, sont pour le moins curieuses. Une nuit, il s’est réveillé et a dit à ma mère : «Je dois aller en Afrique! Schweitzer va mourir.» Ma mère lui a dit de se rendormir, qu’il avait dû faire un cauchemar. Une semaine plus tard, il partait photographier Schweitzer. Six mois plus tard, Schweitzer était mort. Il avait eu une vision. C’est lui qui décidait qui il voulait photographier. Il fonctionnait rarement par commandes.


2. Les portes de Hollywood grandes ouvertes
Grâce à un contact, mon père avait appelé les studios Paramount pour photographier le réalisateur Cecil B. DeMille. Il a bien sûr réussi. DeMille, qui venait de terminer Les 10 commandements, a aimé ses photos et lui a ouvert toutes grandes les portes de Hollywood. Il a photographié des tonnes de vedettes par la suite.


3. Un homme cultivé et amoureux des arts
Mon père était d’abord et avant tout fasciné par les grands artistes. Il a photographié plusieurs grands peintres québécois et canadiens, dont A.Y. Jackson, Alfred Pellan et Marc-Aurèle Fortin. Ce dernier n’acceptait pourtant jamais qu’on le prenne en photo. Il faisait des échanges avec les artistes. Il demandait une œuvre en échange de ses photos. J’ai donc été entouré d’art et de culture toute ma jeunesse. J’espère que les gens qui vont visiter l’exposition vont s’imprégner de ces artistes, les plus grands de la planète, comme les danseuses Plissetskaïa et Maximova, qu’on ne connaît pas toujours. Une image vaut mille mots. Une fois qu’on a vu quelqu’un, on la connaît déjà un peu plus. Dali, si on ne l’avait jamais vu, on saisirait beaucoup moins sa personnalité.


4. Les Beatles ou Rubinstein?
J’ai vite compris que l’œuvre de mon père serait plus grande que lui. Pourtant, il doutait toujours. Et produisait ensuite de petits chefs-d’œuvre. Je lui disais de photographier les Beatles. Mais ça ne l’intéressait pas. Il aimait les classiques. Il préférait photographier le pianiste Arthur Rubinstein. Aujourd’hui, une photo des Beatles vaudrait probablement plus que celle de Rubinstein!


5. Rendre tout le monde beau
Mon père tentait de rendre ses modèles à l’aise. Il leur parlait de sujets qui les passionnaient et c’est là qu’il obtenait les meilleures expressions. Et il appuyait sur le bouton au bon moment. Il avait un don. Il rendait tout le monde beau, même les laids! Je ne sais pas comment il faisait! Il n’y avait pas Photoshop à l’époque, mais il grattait les négatifs ou utilisait certains produits et crayons pour effacer des détails. En grattant, par exemple, il pouvait amincir la taille de Guilda.


6. Proximité avec les artistes
Mon père devenait ami avec presque toutes les personnes qu’il photographiait. Il avait photographié l’actrice Jayne Mansfield, en 1957. Alors qu’elle était de passage à Montréal, quelques années plus tard, mon père l’avait appelée et elle était venu chez nous. Il l’a photographiée dans notre jardin.


7. La bosse des affaires
Mon père photographiait parfois les politiciens, même si ceux-ci n’étaient pas ses amis. Il savait qu’il pouvait vendre beaucoup de copies à l’approche des élections. Une année, il a photographié Lester B. Pearson et John Diefenbaker. Les deux ont utilisé la photo qu’il a faite d’eux pour leurs pancartes électorales! Il a photographié Duplessis, Lesage, Bourassa.


8. Un grand voyageur
Mon père a voyagé partout dans le monde. De la Russie à Haïti, en passant par la Scandinavie. Ses photos de voyage sont dignes du National Geographic. Il demandait des voyages aux compagnies aériennes en échange de photos. Quand il est revenu de Russie, en 1959, la GRC l’avait rencontré pour savoir ce qu’il faisait là. «Je prenais des photos», avait-il simplement répondu. Il a exposé ses photos de Moscou à New York, parce que les Américains étaient curieux de connaître le quotidien des Russes. Il n’y avait pas Internet à l’époque…


9. Le scoop du roi Hussein
Mon père obtenait toujours ce qu’il voulait. Et il avait souvent des exclusivités. Quand il est allé photographier le roi Hussein, en Jordanie, celui-ci lui a dit : «Aujourd’hui, je vais te donner un scoop. Je vais te présenter ma nouvelle femme.» Le lendemain, les photos étaient publiées dans le Time.


10. Une collection miraculée
Il était grand temps qu’on fasse une exposition sur l’œuvre de mon père. Cette collection de portraits a vécu toute sorte d’aventures. Il y a eu un feu au studio dans les années 1960, des vols, du vandalisme, des inondations… Disons que c’est presque un miracle qu’on puisse encore avoir accès à ces documents.


Gaby – Maître du portrait

• Du 15 septembre au 16 novembre sur la promenade des Artistes, le Parterre et le boulevard De Maisonneuve
• Du 16 septembre au 7 juin 2015 à la Grande Bibliothèque

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