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Entrevue # 4 | Laurent Maisonnave

17 juin 2011

Texte principal du billet

Sur son blogue, Laurent Maisonnave se présente comme un influenceur du web. Chroniqueur médias, conférencier, auteur, podcasteur et chargé de cours, il est également président d’Île sans fil et fondateur de Seevibes.

Par Marie-Pierre Bouchard
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Qu’est-ce que Seevibes?

C’est un site qui mesure l'audience sociale de la télé et de la radio, en tenant compte de ce que le public exprime. Nos clients sont donc les télédiffuseurs et les radiodiffuseurs. Le lancement officiel aura lieu à la rentrée, mais nous avons déjà un blogue en ligne.

Quelle tendance observes-tu à propos des habitudes des téléspectateurs?

Une récente étude américaine démontre que 70 % des téléspectateurs surfent sur Internet pendant qu’ils regardent la télé, et qu'une forte proportion d’entre eux le font dans le but d'interagir sur les médias sociaux à propos de ce qu’ils sont en train de visionner. Sur Facebook, les pages qui reçoivent le plus de clics J’aime sont celles des émissions de télé! Et sur Twitter, c’est le sujet qui suscite le plus d’échanges (on appelle ce phénomène le twivage).  La télé est donc le rendez-vous #1 des internautes!

C’est donc dire que cette relation privilégiée avec la télé et la radio, que nous avons entretenue au cours des dernières décennies, est donc encore très forte. Malgré toutes les options qui leur sont offertes aujourd’hui, non seulement les gens continuent de regarder la télé, mais ils y ajoutent une couche d'interaction sociale. C’est ce que je définis comme étant le « 2e écran »: entre nous et l'écran de télé, il y a cette autre fenêtre (un téléphone intelligent, un laptop, ou un iPad surtout est l'image phare) qui nous permet d’interagir socialement.

Comment la technologie a-t-elle su ainsi transformer les habitudes?

Les réseaux sociaux sont si faciles à utiliser, si accessibles! Autrefois, le clavardage était réservé aux informaticiens. Maintenant, ma mère peut le faire sans peine. Et le matériel se développe de manière à en simplifier la manipulation : ma fille de un an arrive à activer certaines fonctions du iPad! Après 15 ans dans le grand public, Internet commence à atteindre une certaine maturité. Il y a toute une nouvelle génération qui a grandi avec, tandis que les anciennes ont appris à la maîtriser. Ça fait partie intégrante de la vie maintenant.

Cette tendance améliore-t-elle la vie urbaine?

Si on prend l’exemple des médias sociaux, je dirais que oui. La géolocalisation est extrêmement utile en ville. Et grâce à nos téléphones intelligents, on partage nos découvertes et nos expériences en temps réel avec nos proches. Par exemple, lorsque je vais au Musée, je prends des photos que je publie sur Facebook ou que j’envoie par courriel. C’est génial lorsqu’on visite une ville étrangère!

Comment Montréal s’inscrit-elle dans cette tendance?

Montréal est une ville de médias! L’industrie de la télé est très importante, les producteurs sont nombreux. Et au niveau des réseaux sociaux, on observe qu’effectivement la communauté montréalaise est extrêmement dynamique. On n’a qu’à penser au Mediacamp ou au Community Camp de Yul Contenu, par exemple. Dans ces événements, l’ambiance est très ouverte, les conférences invitent aux débats et à l’interaction.

Et d’ailleurs, on remarque l’avènement de nouveaux métiers, comme les gestionnaires de médias sociaux, qui sont de plus en plus en demande.

Quelle nouvelle technologie considères-tu particulièrement inspirante et prometteuse, mais qui n'est pas encore utilisée à son plein potentiel?

J’ai envie de parier sur l’avenir des objets connectés. Il est maintenant possible d’attribuer une adresse courriel à n’importe quel objet : on peut donc envoyer des signaux à ces objets, autrement dit on pourrait communiquer avec eux, et eux avec nous! Supposons que ma plante verte a son adresse courriel en plus d’être munie de détecteurs d’humidité dans son pot de terre; elle pourra m’envoyer un message pour me dire qu’elle a besoin d’eau. Mon frigo pourrait aussi me dire qu’il est temps de racheter du yaourt, et le yaourt en question, une fois acheté, me fera signe à l’approche de date d’expiration. Pour l’instant, on connaît le concept de domotique et de « maisons intelligentes », mais c’est encore très sommaire. Je crois qu’on va aller beaucoup plus loin et que tous les objets seront un jour connectés.

Comment perçois-tu Montréal?

Montréal est une ville connectée. Les gens sont très faciles d'accès, le contact est facile et se fait rapidement. Il y a beaucoup d'occasions de rencontres, de 5 à 7, d’événements. C’est une ville extrêmement agréable sur le plan social. J’aime le mélange culture/technologies, qui se mêle naturellement. L'art de vivre est une évidence ici.

Qu’aimerais-tu voir se développer à Montréal?

L’ambition. Elle serait justifiée et méritée, car Montréal regorge de talents.

Qu'est-ce qui, à Montréal, mériterait plus de visibilité, d'attention ou d'amélioration?

On vend très bien l'art de vivre ici. On a de bons restos, de belles terrasses, une culture foisonnante. Mais ce n’est pas une excuse pour cacher le dynamisme économique. Pour moi, l’économie a autant de valeur que la culture! On est une capitale de l'innovation. Même s’il n’y a pas ici une entreprise qui a le poids d’un Google, on a pourtant des dizaines et des dizaines de « miniGoogle » qui méritent d'être mises en valeur!

Qu’est-ce qui, selon toi, aurait le pouvoir de transformer le visage urbain en intégrant l'usage des technologies?

Il faut développer des logiciels pour optimiser les investissements urbains. Par exemple, lorsqu’on décide de monopoliser une artère afin de réparer des nids de poule, il faudrait un service informatisé qui permet aux différents services urbains de communiquer entre eux et de se coordonner pour tout réaliser en même temps. On creuserait une fois, et on en profiterait pour changer le système d’égouts, l'électricité, et refaire la chaussée, d’un seul coup, plutôt que d’embêter les gens en creusant trois fois! En plus, on économiserait des sommes considérables!  Il est évident que les technologies sont là et peuvent offrir ce genre de solutions. Maintenant, cela relève aussi d’une volonté politique, il faut des élus visionnaires, des personnes ambitieuses. À nous de les élire…

Quelles sont tes sources d'inspirations?

J’aime beaucoup le magazine Wired.

Mais ce sont surtout les gens qui m’inspirent. Sylvain Carle, par exemple. Montréal a de la chance d’avoir un individu comme lui qui influence positivement son rayonnement!

Et ma fille d’un an et demi m’inspire d’une toute nouvelle façon.

Qu’est-ce qui a bouleversé ta perception du design?

Le Musée Guggenheim Bilbao, conçu par l’architecte Frank O. Gehry. Ce monument d’avant-garde du XXe siècle m’a énormément marqué d’un point de vue architectural.  Lorsqu’on parlait du pouvoir de transformer la vie urbaine, je trouve que Guggenheim est un exemple parfait. Bilbao  était une municipalité industrielle, et ce monument architectural a éclot comme une fleur, il a complètement transformé la ville! Ce genre de réalisations a un impact immense et extrêmement positif sur la vitalité et la beauté des villes.

Quels sont les moyens de communication que tu utilises le plus?

Mon iPhone. Facebook. J’ai aussi un compte Twitter, mais je l’utilise avec parcimonie, de manière professionnelle uniquement.

Comment te renseignes-tu sur ce qui se passe à Montréal?

C’est surtout mon réseau d’amis qui me tient au courant (de vive voix ou via Facebook).

Quelle est l'organisation avec qui tu entretiens un dialogue ouvert et constant, celle qui te parle le plus et le mieux?

La SAT est un bel exemple. Elle regroupe tout ce qui a de bien en termes de rencontres entre la techno et la culture, en plus d’occuper une belle place au sein de la communauté.

Qu’est-ce qui t’irrite dans la manière de communiquer de la part de certaines entreprises?

Les entreprises qui n’ont pas compris qu'aujourd'hui, le partage de l’information est aussi important que l’information elle-même. Certaines compagnies résistent encore à inclure un espace commentaire à leur site web, pour éviter de se faire ouvertement critiquer! Pour moi, ça va complètement à l’encontre de la façon de communiquer à l’ère du 2.0. L'information est maintenant accessible à tous; les entreprises doivent rentrer ça dans leur tête, et se préparer au mieux à recevoir le feedback de leur clientèle.

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